Il n’aura échappé à personne que la méditation a aujourd’hui le vent en poupe. Avec un rythme de vie effréné, cette pratique constitue un moyen simple de s’accorder du temps pour soi. De ce fait, elle permet d’accéder au bien-être sans contrainte. Mais bien au-delà d’une simple technique de relaxation du corps et de gestion du stress, il s’agit d’un véritable entraînement de l’esprit. La méditation tibétaine, qui s’inscrit dans une quête spirituelle, figure parmi les formes les plus imposantes de cet art ancestral. Intimement liée au bouddhisme tibétain, elle est perçue comme une branche à part entière. D’ailleurs, son principal objectif consiste à se rapprocher du divin et d’atteindre le nirvana, par extension l’apaisement. Soulager les tensions accumulées dans le corps, calmer le mental saturé de stress, reposer l’esprit, lâcher prise… Cette discipline ouvre réellement la voie vers l’harmonie entre le corps et l’esprit.
Vous voulez en savoir davantage sur ce monde encore inconnu du grand nombre ? Cet article se consacre à ce sujet.
Sommaire
La méditation tibétaine plus en détails
Née au Tibet au Ve siècle, il s’agit d’un concept clé du bouddhisme tibétain. Selon la légende, sa première pratique remonterait au règne du 28e roi du pays, Lha Thothon Nyantsen. Elle se définit aujourd’hui comme une pratique spirituelle visant à aider le méditant à se détacher de son égo. Mais aussi de tout ce qui le freine et l’empêche de redécouvrir la bonté fondamentale.
Comme nous l’avons évoqué supra, le but de cette forme de méditation est d’atteindre le nibbana. C’est ce qu’on appelle communément le nirvana dans la méditation tibétaine. Celui-ci correspond à l’interruption du nāma (le mental) et du rupa (le physique). Pour aller encore plus loin, dans le bouddhisme tibétain, elle permettrait d’obtenir la libération complète du samsara (le cycle des renaissances ou la réincarnation). À long terme, cette méthode pourrait conduire à la plus haute perfection de l’esprit : l’éveil spirituel.
En d’autres termes, cette discipline trace le chemin vers la réalisation de sa nature de bouddha et l’harmonie avec la réalité authentique. Elle nous aide à cultiver de la douceur envers nous-mêmes sans aucune attente ni préjugé. En définitive, la méditation tibétaine contribue à améliorer notre façon de voir et d’apprécier le monde.
Dans l’histoire du bouddhisme tibétain, le prince Siddhārtha Gautama aussi appelé Bouddha Sàkyamuni a atteint l’illumination. Et ce, en méditant sur l’arbre de la Bodhi ou figuier des pagodes il y a de cela 2 500 ans. Ce qui explique pourquoi cette technique de réflexion pourrait surclasser toutes les autres.
Selon Chögyam Trungpa, maître bouddhiste du Tibet, c’est « le moyen de se redécouvrir et de redécouvrir en soi la bonté fondamentale. » Ainsi, elle aurait véritablement le pouvoir d’amener à la compassion.
Les piliers de la méditation tibétaine
Pour permettre aux pratiquants d’arriver à la pleine conscience, cette pratique repose sur 3 axes fondamentaux :
- la pacification de l’esprit ou samatha (Chiné) ;
- la vision supérieure ou la reconnaissance des qualités de l’esprit ou vipassana (Lhaktong) ;
- l’apprentissage de la compassion (Tonglen).
Le Chiné (chi : dans la paix, né : l’esprit demeure)
Aussi appelé samatha en sanskrit, il vise à calmer le mental et à parvenir à la relaxation du corps. Pour cela, il est impératif de développer sa capacité à stabiliser l’esprit dans le calme. C’est la première étape dans la méditation tibétaine. On le nomme samadhi de Chiné en tibétain et est traduit généralement par la pacification de l’esprit, l’absorption méditative ou encore la contemplation.
Quoi qu’il en soit, le Chiné permet de se libérer de toutes formes de perturbations. Dans la pratique, il s’agit d’un travail préparatoire permettant de discipliner l’esprit. Et ceci, en vue d’effectuer la méditation de manière plus authentique, autrement dit le vipassana. Pour ce faire, le Chiné inclut :
- le ānāpānasati ou l’attention portée sur le souffle ;
- le mettā bhāvanā ou le développement de la bienveillance ;
- le dhyāna ou le développement de la concentration.
La méditation tibétaine suppose que la personne se place dans un premier temps dans la position du lotus. Il s’agit d’une posture de hatha yoga et d’une position exécutée dans la méditation bouddhique. Ici, le pratiquant croise ses jambes, repose ses mains sur les genoux en touchant le sol et garde la tête dans l’alignement de la colonne. Puis dans un second temps, ce dernier place son esprit dans un état de vigilance sans qu’il y ait la moindre distraction.
Le Lhaktong ou la vision pénétrante
Traduit du sanskrit vipasyana, le Lhaktong est une étape approfondie de la méditation. Dans la méditation tibétaine, il a pour finalité de développer le panna ou la sagesse. Pour cela, le méditant doit développer sa capacité à voir les trois caractéristiques de l’existence ou le tilakkhana :
- l’insatisfaction (dukkha) ;
- l’impersonnalité (anatta) ;
- l’impermanence (anicca).
Le pratiquant doit également avoir une vision intuitive de tous les phénomènes corporels et mentaux (kandha) pouvant affecter son jugement rationnel.
Il faut savoir que la progression de l’esprit passe par ce que nous appelons les cinq chemins. D’abord, il y a le chemin de l’accumulation qui se divise lui-même en plusieurs parties : pour débutants, intermédiaires et experts en méditation tibétaine. Par la suite, on retrouve le chemin de l’application sur lequel la méditation de vipasyana peut être renforcée. C’est le moment de passage du Chiné à Lhaktong. Concrètement, il s’agit de la période au cours de laquelle la personne améliore la faculté à connaître les phénomènes et à se reconnaître elle-même. Lorsque l’esprit est capable de tout identifier, elle a donc déjà acquis une certaine sagesse.
Et plus cette sagesse va se développer, plus l’esprit pourra déterminer la vraie nature des choses. Il sera capable d’apercevoir entre autres la dépendance des kandha. On l’appelle ainsi la vision pénétrante dans la méditation tibétaine.
Le Tonglen
Cette pratique est appelée le don du bonheur et la prise en charge de la souffrance, car elle entraine l’esprit à éveiller la compassion. Qui plus est, elle permet de développer la capacité du méditant à accepter les événements extérieurs. Ce qui signifie que l’individu ne refuse pas de recevoir la souffrance d’un ou de plusieurs êtres et leur renvoie le bonheur à la place. Cette technique de méditation se présente tel un tube qui absorbe le négatif et ressort le positif.
En général, la personne imagine la souffrance de ses proches sous forme de fumée lors d’une méditation tibétaine. Grâce à un mouvement d’inspiration, celle-ci s’estompe au centre de l’être. À l’expiration, une lumière apparaît comme symbole de bonheur renvoyé à chaque être.
En pratique
Contrairement au bouddhisme zen qui privilégie la posture zazen, il existe différentes manières de pratiquer la réflexion du bouddhisme tibétain. Néanmoins, il se révèle important de choisir une posture qui permet d’arriver à un apaisement total du corps. Mais également à un état d’alerte, exempt de tension et de stress. Pour les moines du Tibet, la posture en 7 points est souvent réalisée. Celle-ci entre d’ailleurs dans les exercices à privilégier dans la méditation tibétaine.
Elle s’effectue de la manière suivante :
- les jambes croisées dans la position du lotus complet ou en demi-lotus ;
- les mains positionnées en mudra cosmique ;
- le dos droit, sans être tendu et le diaphragme ;
- la langue touche l’arrière du palais ;
- la tête légèrement inclinée vers l’avant, le coup courbé en forme de crochet et le menton légèrement rentré ;
- les yeux à moitié ouverts et dirigés vers le bas dans le prolongement de l’arête du nez ;
- les épaules et les coudes au même niveau et légèrement éloignés du corps.
Par ailleurs, pour pratiquer la méditation tibétaine dans les meilleures conditions, il s’avère important de se retrouver dans un endroit calme. Il est également important de s’éloigner de toute distraction. N’hésitez pas à prévenir vos proches que vous avez besoin d’un moment de tranquillité si vous ne vivez pas seul.
Vous l’aurez compris, le cadre doit être propice afin que cette technique de relaxation fasse tout son effet. Cependant, vous n’obtiendrez pas forcément des résultats satisfaisants du premier coup. C’est pourquoi la discipline et la témérité sont de mise. De plus, il s’agit d’une activité à faire de manière régulière. Ainsi, la méditation tibétaine demande du temps et de la persévérance.
Les obstacles à l’atteinte du nirvana
Méditer est un exercice délicat qui nécessite une parfaite concentration. Au moment de la pratique, il se peut que l’individu rencontre des obstacles susceptibles de le bouleverser par la suite. Ceux-ci peuvent se manifester lors de la pacification de l’esprit ou de la vision pénétrante.
Samatha
D’une manière générale, il existe deux obstacles qui empêchent le méditant de stabiliser son esprit dans l’étape du samatha. D’un côté, il y a l’agitation de l’esprit découlant d’une émotion forte ou d’un fervent désir. La personne qui fait de la méditation tibétaine peut également faire face au regret. Il se manifeste au moment où l’individu se rappelle des actions effectuées dans le passé. Or, ce dernier ne trouvera aucun bienfait à se remémorer l’accompli. Cela ne fera que nourrir encore plus l’agitation.
Vispasyana
Les difficultés rencontrées lors de la vision pénétrante concernent :
- le doute ;
- l’opacité mentale ;
- la torpeur.
Le doute crée des perturbations lors de la méditation. Il se réfère au chemin de vie choisi par l’individu. Ainsi, ce dernier pourrait avoir des hésitations dans tout ce qu’il entreprend. Ce qui constitue une entrave à vispasyana dans la méditation tibétaine.
En outre, l’esprit et le corps peuvent subir une lourdeur et perdre leur souplesse en conséquence. Cela peut résulter d’une alimentation trop grasse ou d’une accumulation karmique. Enfin, il y a la torpeur qui se traduit par la diminution de la sensibilité sans perte de conscience. Effectivement, l’endormissement survient plus facilement après avoir consommé une quantité importante de nourriture. D’où l’importance d’un sommeil régulier.
En revanche, pour une méditation intensive, l’idéal serait de se lever de bonne heure le matin et de ne plus manger l’après-midi. Boire de l’eau reste toutefois essentiel.
La méditation tibétaine : les obstacles communs
Si le Chiné et le Lhaktong présentent chacun leurs propres difficultés, il y a également des obstacles communs à ces deux techniques de méditation.
Tout d’abord, nous retrouvons le besoin d’exprimer les plaisirs des sens. Ce qui a pour effet l’agitation continuelle de l’esprit et donc la malveillance. L’esprit cherche alors en permanence à nuire aux autres. Ensuite, nous avons la spéculation qui s’explique par la distraction de l’esprit souhaitant passer d’une pratique à l’autre. Concrètement, lorsqu’une forme de méditation ne satisfait pas la personne, elle entame une nouvelle méthode. Cependant, on apprend dans la méditation tibétaine qu’il faut préserver et ne jamais abandonner.
Les objets extérieurs représentent également une autre distraction pour l’esprit. Et pour cause, l’individu se préoccupe sans cesse de ces objets, et plus globalement, de tout ce qui l’entoure. En les identifiant, l’esprit crée alors des émotions perturbatrices. Concernant les objets intérieurs, l’inattention peut aussi provenir de la torpeur et de l’opacité mentale vues précédemment. Si l’on divise ces deux éléments, la torpeur indique la lourdeur d’esprit et l’opacité mentale, le manque de conscience.
Le chiné ou le samatha : l’étape clé de la méditation tibétaine
L’objectif principal de la méditation du bouddhisme tibétain est d’atteindre une vision directe de la nature de l’esprit. Et cela, pour permettre au méditant d’éveiller sa nature de bouddha. Toutefois, pour y arriver, il doit avant tout prendre le contrôle de l’esprit. Mais aussi, être capable d’en apaiser les perturbations et de le maintenir en état de calme mental.
Il s’agit de la visée principale de la pratique du Chiné ou la pacification de l’esprit. Durant cette phase, le méditant est amené à choisir entre quarante objets adaptés à la méditation tibétaine. Ceci, afin de toucher le samadhi, une forme de concentration très profonde.
Pour les débutants qui ne connaissent pas encore l’objet de méditation qui leur convient, il est fortement conseillé de commencer par le ānāpāna sati. Lorsque l’esprit sera complètement concentré sur cet aspect et totalement présent dans l’ici et maintenant, les ruminations mentales et les perturbations psychiques cesseront d’exister. Ensuite, le méditant atteindra le jhanas, un état de grand bonheur (à ne pas confondre avec l’illumination). Par ailleurs, il faut savoir que pour accéder à la deuxième étape de la méditation tibétaine (Lhaktong), il faut pratiquer le samatha un an minimum. Et ce, quotidiennement.
La méthode de réflexion du bouddhisme tibétain implique un travail de développement de la conscience de l’impermanence, de la vigilance et de l’amour. Il faut se laisser inspirer afin d’atteindre le but ultime : le nirvana. Alors, êtes-vous prêt à plonger dans cet univers de compassion ?
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